Bien-être financier et data. Stella Walter et Léa Joussaume, Luko

    Nous avons interrogé Stella Walter, VP of People et Léa Joussaume, Head of Brand & Communication de chez Luko, sur le bien-être financier des salariés. Elles nous expliquent notamment le rapport avec la data. 

    Le bien-être financier, est-ce sur ou sous-coté ?

    Il est important que les gens qui travaillent chez Luko ne se lèvent pas le matin avec les yeux sur leur compte bancaire ou avec une quelconque angoisse financière. La politique de rémunération chez Luko est ainsi très pragmatique et s’adapte au marché de la tech qui est globalement sous tension et imprévisible. On a une volonté profonde de ne jamais rémunérer en dessous du marché et donc on se  réaligne à chaque fois que c’est nécessaire en prenant régulièrement son pouls.

    Le salaire doit être à la hauteur de la valeur ajoutée de la personne mais également de ce qu’elle pourra aller chercher demain sur ce marché. Pour éviter la surenchère, on benchmarke, on travaille avec des partenaires externes qui nous fournissent des études du marché startup tech, on est hyperconnecté pour récupérer toutes les données nécessaires. 

    On est même en train de recruter quelqu’un qui va travailler en bonne partie sur notre système de compensation, et sur notre principal atout : une grille de salaire développée maison. Elle sert de base pour rémunérer nos équipes de manière équitable aujourd’hui. Et au-delà du marché, il y a deux autres facteurs qui sont importants dans la rémunération :

    • Ce qu’on appelle chez nous des perks, c’est-à-dire des avantages périphériques : une carte ticket resto dont le montant est aligné avec les meilleures pratiques du marché, un environnement de travail intéressant en termes de device, des congés illimités, mais aussi un  soutien à la parentalité avec un mois de congés second parent et des possibilités de prise en charge de places en crèches. 
    • Et la deuxième chose importante pour nous, c’est de proposer des BSPCE à l’ensemble des salariés. Chez Luko, on a donc un pool qui est à la hauteur de notre objectif, ce qui nous permet de ne pas avoir à choisir entre, donner peu à chacun ou donner des montants intéressants et valorisables à un petit nombre de rôles clés.  

    Donc oui, le confort financier est une notion importante et chez Luko, on l’aborde de manière très pragmatique.

     

    Donc, c’est vous qui spontanément proposez, avant que les gens viennent frapper à votre bureau, des augmentations ?

    Ça se rapproche en tout cas de notre philosophie.  On essaie d’évaluer effectivement ce salaire de manière proactive. On discute deux fois par an, a minima, du salaire au cours des people reviews, en se basant sur notre grille interne. Ça ne veut pas dire qu’on augmente tout le monde tous les six mois évidemment, mais ça permet d’éviter les frustrations, d’avoir des conversations régulières sur le sujet et d’anticiper les évolutions. 

    La grille dont je vous ai parlé est basée sur cinq critères. 

    • Il y d’abord la composante métier de base : on applique un index en fonction des différents métiers, des compétences techniques, des backgrounds qu’ils impliquent, et de la tension du marché.   
    • Ensuite les “years of experience”, c’est-à-dire qu’on intègre également la composante de la séniorité. Les années d’expérience comptent, que ce soit dans l’entreprise pour valoriser l’ancienneté ou dans d’autres entreprises pour valoriser le background acquis ailleurs et que le collaborateur amène chez nous. Tout ça on le rétribue. 
    • Le critère du niveau d’expertise rentre en jeu également. Là, il faut déterminer à quel niveau d’expertise se trouve la personne sur son métier, et cela a un impact direct sur son niveau dans la grille et sa rémunération.
    • Puis, on a la composante leadership : on peut être contributeur individuel mais on peut aussi avoir un niveau d’impact qui est majoré en étant, par exemple, manager d’une équipe ou manager d’un projet plus important. Là, on va appliquer un coefficient supplémentaire. Ce qui est intéressant c’est que l’on a des profils qui sont mieux rémunérés en tant qu’experts qu’en étant managers, par exemple.  
    • Enfin, nous avons intégré comme dernier critère le lieu de vie. On a conscience que les contraintes et pouvoir d’achat ne sont pas les mêmes à Paris, Londres, ou dans une petite ville. Un indicateur majore ainsi les salaires de 10 % lorsque les collaborateurs sont dans de grandes villes, peu importe qu’ils soient en télétravail ou pas. 

    Toutes ces data composent notre grille et nous aident à calculer un salaire juste. 

    Pour aller dans le sens de la transparence, après avoir interrogé nos équipes, on a décidé de communiquer la grille en interne pour permettre à tous de faire des calculs, des projections et mieux comprendre leur salaire.  

     

    De cette façon, vous arrivez à une transparence totale qui permet d’éviter les traitements discriminants ?

    On part du postulat que tout le monde a envie que ce soit clean et honnête. Mais comme dans toutes les structures, chaque manager a des biais, lors de l’évaluation de son équipe, par exemple. On s’assure donc que les évaluations sont justement attribuées et on invite les managers à retravailler ces calibrations, si nécessaire. Ces facteurs psychologiques existent, c’est pour ça qu’on essaie d’utiliser le plus d’outils, de rationnel et de transparence possible dans la méthode, pour éviter ces biais.

     

    Sur la centaine de salariés, vous avez une majorité de développeurs web ?

    On a fêté notre centième salarié il y a peu de temps, en effet !  Près de 50 % des salariés ont des profils ingénieurs : une quarantaine de développeurs software, mais aussi des ingénieurs hardware qui travaillent sur des solutions un peu plus long terme et plus surprenantes, puisqu’on travaille sur des solutions devices et des services de protection des foyers. Donc, on n’a pas exclusivement des développeurs web. 

     

    Finalement, vous arrivez à mieux fidéliser les gens que des concurrents ou autres grâce à cette grille ou à cette stratégie ?

    C’est difficile à dire, mais on a un taux de turnover qui est aujourd’hui assez bas, en tout cas, dont on a pas à rougir et qui nous rassure sur le fait qu’on est, a priori, dans la bonne direction. Les employés sont satisfaits de pouvoir s’appuyer sur elle, pour autant elle n’évite pas les discussions au niveau du salaire. Au contraire, elle les encourage, et permet d’appréhender des points de frustration en amont.

    Maintenant ce n’est pas terminé, on est conscient que cette grille doit vivre. A minima, elle sera réévaluée chaque année, et va devenir de plus en plus granulaire pour coller au plus près à la réalité du marché et permettre une juste évaluation de la performance de chacun.

    Après, ce n’est pas forcément la grille en tant que telle qui nous permet de retenir les gens, je pense plutôt que c’est une brique de notre culture qui est celle de la transparence et de l’équité dans les modes de fonctionnement. On a envie de faire les choses de la manière la plus fair et consistante possible.

    Quand on sait que le temps moyen dans un poste est d’un an et demi dans la tech, aujourd’hui on a des gens qui sont là depuis le début et on en est très fiers. Léa en est un bon exemple, il faudrait lui demander.

     

    Léa, qu’en penses-tu ?

    Je suis d’accord avec Stella, on a l’impression d’être beaucoup mieux suivis dans notre progression et qu’il y a vraiment un cadre. On sait que le système est fair. Ça met tout le monde sur un pied d’égalité et globalement ça fait partie de la culture pour laquelle les gens viennent chez Luko : la transparence. C’est une grosse clé qu’on essaie d’inculquer auprès de nos clients : être transparent sur nos contrats d’assurance et faire les choses différemment.

     

    Tout à l’heure, Stella, tu parlais du rôle de l’employeur et de sa relation avec le collaborateur. Le rôle de l’employeur, c’est de donner un salaire. Est-ce aussi de pratiquer de l’éducation financière ?

    C’est une bonne question et c’est compliqué… On a un rôle évidemment parce qu’on est prescripteur et mine de rien, c’est l’employeur qui est la source principale, si ce n’est la source ultime de revenus.

     

    Est-ce qu’il y a d’autres terrains que vous investissez ?

    Avec l’équipe RH, on travaille sur la mobilité durable. C’est typiquement un sujet où on sort du schéma contribution/rétribution financière, on est vraiment dans le perk par essence et on est dans cette volonté d’accompagner l’employé dans sa vie au quotidien. Luko a envie de pousser les usages et promouvoir des modes de mobilité alternatifs. 

    Donc, on va subventionner, on n’a pas encore cocher toutes les cases de ce qu’on allait subventionner ou non, mais, a minima, on va rembourser du kilométrage et il est probable qu’on subventionne, peut-être, des réparations de vélos etc. dans la limite du forfait mobilité.

     

    Tu en penses quoi d’une app comme Rosaly ? Est-ce que ça peut être un service important pour les collaborateurs ?

    Je la jouerai très Luko et j’irai poser la question en interne pour ne pas projeter mes biais. Oui, c’est intéressant d’avoir de la flexibilité pour les employés. On a aussi une responsabilité en tant qu’employeur, même si on utilise Rosaly en tant que plateforme et en tant qu’intermédiaire, de s’assurer que Rosaly fasse de l’accompagnement et ne crée pas seulement de la flexibilité sans cadre.

    Pour une bonne gestion financière, je pense c’est important pour les employés d’avoir un cadre qui ne change pas du mois au mois. Donc oui, pourquoi pas, s’il y a des tips, s’il y a un cadre, si toute la solution intègre une pédagogie en amont.

    Ce n’est pas évident d’aller voir son RH et de lui expliquer qu’on veut une partie de son salaire avant. Quelque part, ça peut donner le sentiment qu’on n’a pas géré correctement ses finances. Quand on a une mauvaise surprise ou un imprévu financier, on n’a pas toujours envie d’aller toquer à la porte de notre Rh pour en parler. Donc, j’imagine qu’on a des gens qui se censurent et en ce sens oui, c’est un service intéressant. 

     

    Est-ce qu’il y a des avantages ou des services avant Covid qui étaient importants et qui maintenant vont être remplacés par des services un peu plus personnels et des mesures moins collectives.

    Avant, on faisait des off site, on sortait, on célébrait des moments communs. Maintenant, on tente de nouveaux formats, par exemple pour fêter la nouvelle année, on a envoyé des vêtements personnalisés Luko, là où on aurait probablement organisé un évènement collectif avant.
    On a été assez audacieux en organisant deux off-sites 100 % virtuels et ça s’est plutôt bien passé. A chaque fois, on a envoyé des petites surprises à chaque individu pour célébrer le moment ensemble.

    Ensuite, les sujets de la santé mentale, comme le wellness, prennent de l’ampleur. On réfléchit à un accès à une plateforme d’accompagnement sur des problématiques de santé mentale, donc de l’accompagnement individualisé. Il est certain que ça fait longtemps que ça dure et c’est difficile de rester sourd. Chez Luko, on organise des surveys en interne, avec une prise de pouls régulière du eNPS. Et les résultats sont forcément assez fluctuants en cette période. Avec les réponses qualitatives, on se rend compte que parfois? il s’agit aussi de problématiques assez personnelles, en tout cas très individuelles et souvent liées au contexte actuel.

    Le NPS évalue l’attachement du consommateur à un produit avec la question : jusqu’à quel point sur une échelle de 1 à 10, recommanderiez-vous tel produit à un ami ? Le “eNPS”, c’est le même principe mais concernant l’attachement du collaborateur à son entreprise. En dessous de 8, on considère que la personne n’est pas sponsor et en dessous de 6 ou 5, on considère qu’elle est un détracteur. C’est un indicateur exigeant et aujourd’hui, on pose la question chaque mois. Ça nous permet de prendre un peu le pouls des équipes et de comprendre comment les gens se sentent. Puis d’établir des plans d’action lorsque cela s’avère nécessaire.

    1_prT1fS9JfTsi9oyVx1x4bw Stella Walter, VP of People 

    IMG_9006-2-min-1564646112 Léa Joussaume, Head of Brand & Communication